lundi 3 décembre 2012

William Forsythe-Trisha Brown 3-31 décembre 2012


In The Middle, Somewhat Elevated
Musique originale - Thom Willems
Chorégraphie, scénographie, costumes et lumières  - William Forsythe 
Ballet créé pour le ballet de l'Opéra national de Paris le 29 mai 1987
Durée : 28 mn

O Zlozony / O Composite
Musique originale - Laurie Anderson 
Chorégraphie - Trisha Brown 
Décor - Vija Celmins Night Sky #18 (1999)
Costumes - Elisabeth Cannon 
Lumières - Jennifer Tipton 
Ballet créé pour le ballet de l'Opéra national de Paris le 17 décembre 2004
Durée : 15 mn

Woundwork1
Musique originale - Thom Willems 
Chorégraphie, scénographie et lumières - William Forsythe 
Costumes - Stephen Galloway 
Ballet créé pour le ballet de l'Opéra national de Paris le 31 mars 1999
Durée : 25 mn

Pas./Parts
Musique originale - Thom Willems
Chorégraphie, scénographie et lumières - William Forsythe
Costumes - Stephen Galloway
Ballet créé pour le ballet de l'Opéra national de Paris le 31 mars 1999
Durée : 35 mn

vendredi 16 novembre 2012

Don Quichotte 16 novembre - 31 décembre 2012



Don Quichotte
Ballet en un prologue et trois actes d'après quelques épisodes du roman de Miguel de Cervantès
Chorégraphie et mise en scène - Rudolf Noureev d'après Marius Petipa
Musique - Ludwig Minkus
Arrangements et orchestration - John Lanchbery
Décors - Alexandre Beliaev
Costumes - Elena Rivkina
Lumières - Philippe Albaric
Orchestre de l'Opéra national de Paris
Direction musicale - Kevin Rhodes
Ballet créé pour le Ballet de l'Opéra de Paris le 6  mars 1981

Dorothée Gilbert - Karl Paquette

dimanche 11 novembre 2012

Sous apparence - Un jour ou deux


Emilie Cozette

Sous l'apparence, il n'y a rien d'autre que la lumière qui jaillit de la pénombre d’Un jour ou deux. Merce Cunningham est ici dépouillé de certains côtés irritants et même si l’œuvre pourtant fortement écourtée pour cette reprise reste encore un peu inutilement longue, le propos se tient magistralement sans contestation.
Emballage minimal mais convoquant John Cage et Jasper Johns, Merce Cunningham développe avec force sa vision d’une danse qui sort grandie de sa mise à nue. En imposant une esthétique du sombre, du minimalisme, de la précision et du mécanique, Merce Cunningham livre une œuvre léchée qui travaille une idée jusqu’au bout, qui fait corps dans ses pas, dans ses costumes, dans ses décors et dans sa musique. Rien ne déborde, tout est en marche unie pour porter son art au sommet.

Christelle Granier - Axel Ibot - Emilie Cozette - Yvon Demol - Caroline Robert

Pénétré d’intelligence, d’esthétisme et de richesse qui emmènent le public au-delà de la danse, mais à l’aide la danse, le ballet n’est pas une simple et excellente chorégraphie pour la démonstration de l’académisme de son langage ou le plaisir des yeux, il questionne. L’esquisse programmatique de la chorégraphie évoque la thématique kierkegaardienne de la reprise. Avec une insistance et un poids qui s’accroient au fur et à mesure du ballet, le spectateur prend peu à peu à sa charge, la tension qui s’installe dès l’apparition des danseurs derrière un voile au proscenium. Au son de la musique d’ambiance austère de John Cage, ils semblent se libérer au fur et à mesure que les mouvements les déplacent avec grâce et vitesse à travers la scène. Ils s'envolent presque parfois dans une sorte d'apesanteur qu'ils défient avec succès. Les danseurs de l'Opéra de Paris, pénétrés de conviction et plein d'allant se mettent admirablement au service de cette oeuvre collective à l'exigence technique et physique très élevée. 

Axel Ibot - Pauline Verdusen - Nicolas Paul

La scénographie limpide accentue la mise en valeur des ensembles, des positions, des élans dans les mouvements de groupe, véritables maîtres de la magie visuelle produite par des figures souvent très techniques. Les corps s’élèvent et se meuvent dans une harmonie empreinte de géométrie, des envolées transversales, des couches visuelles en profondeur avec la disposition d’un voile au fond de la scène derrière lequel le corps de ballet fait évoluer vision latérale et frontale.  La dynamique est obsessive, ce qui se passe sur scène est captivant voire envoûtant, la magie visuelle pénétrant dans l’esprit.
A la fois inscrit dans une époque mais résolument encore d'actualité, Un jour ou deux montre aussi en cela qu'il est un grand Cunningham.


Simon Valastro - Emilie Cozette - Valentine Colasante

mercredi 31 octobre 2012

Marie-Agnès Gillot-Merce Cunningham 31 octobre-10 novembre 2012



Sous apparence
Musique - Morton Feldman (extraits des 1er, 3e, 4e  et 5e mouvements de Rothko Chapel (1971)), (extrait de Intersection I (1961)), Anton Bruckner (Kyrie et Agnus Dei,  extraits de la Messe n°2 en mi mineur (version 1882)),  György Ligeti (Continuum pour clavecin solo (1970))
Chorégraphie  - Marie-Agnès Gillot
Décors - Olivier Mosset
Costumes  - Walter van Beirendonck
Lumières - Madjid Hakimi
Dramaturgie musicale - Laurence Equilbey
Création pour le Ballet de l'Opéra national de Paris le 31 octobre 2012

Ars Nova Ensemble Instrumental
Chœur Accentus
Direction musicale - Laurence Equilbey
Durée - 30 mn



Un jour ou deux
Musique originale (Etcetera) - John Cage
Chorégraphie - Merce Cunningham
Décors et costumes d'après les maquettes originales de Jasper Johns
Lumières réalisées par Davison Scandrett
Répétitions - Robert Swinston, Jennifer Goggans

Ballet créé pour le Ballet de l'Opéra national de Paris le 6 novembre 1973
Ars Nova Ensemble Instrumental
Direction Musicale - Philippe Nahon, Jérôme Polack
Un Jour Ou Deux est donné avec l'accord du Merce Cunningham Trust
Durée - 1h 07 mn



samedi 27 octobre 2012

Rencontre Don Quichotte


Rencontre Don Quichotte, Amphithéâtre Bastille le 27 octobre 2012
Avec Ludmila Pagliero et Karl Paquette
Clotilde Vayer (maître de ballet) et Elena Bonnay (chef de chant)


samedi 13 octobre 2012

Rencontre Sous apparence


Rencontre Sous apparence, Amphithéâtre Bastille le 13 octobre 2012
Avec Aurélia Bellet, Vincent Chaillet, Alice Renavand
Marie-Agnès Gillot (chorégraphe) et Caroline Beaugrand (chef de chant)

lundi 24 septembre 2012

Balanchine 24 septembre - 18 octobre 2012



Sérénade
Musique - Piotr Ilyitch Tchaikovski, Sérénade en Ut Majeur pour orchestre à cordes, Op. 48 (1880)
Chorégraphie - George Balanchine (1934) réglée par Paul Boos
Costumes d'après Karinska
Lumières réalisées par Perry Silvey
Ballet entré au répertoire de l'Opéra national de Paris le 30 avril 1947
Durée - 33 mn

 (de g à d) Laëtitia Pujol - Eleonora Abbagnato- Pierre Arthur Raveau - Ludmila Pagliero
Agon
Musique originale - Igor Stravinsky 
Chorégraphie - George Balanchine (1957) réglée par Paul Boos
Lumières réalisées par Perry Silvey
Ballet entré au répertoire de l'Opéra national de Paris le 13 mars 1974
Durée - 24 mn

Stéphane Bullion - Eve Grinsztajn

Le Fils Prodigue
Scènes chorégraphiques en trois tableaux de Boris Kochno
Musique originale - Serguei Prokofiev 
Chorégraphie - George Balanchine (1957) réglée par Paul Boos
Décors et costumes d'après Georges Rouault
Lumières réalisées par Perry Silvey
Ballet entré au répertoire de l'Opéra national de Paris le 30 novembre 1973
Durée - 37 mn

Agnès Letestu - Emmanuel Thibault

Programme précédé du défilé du ballet les 24 et 26 septembre 2012
Défilé du Ballet
Musique - Hector Berlioz, Marche, extrait de l'opéra Les Troyens
Les Étoiles, les Premiers Danseurs, le Corps de ballet
et
Les Élèves de l'école de danse
Durée - 15 mn

 Agon
(de g à d) Christophe Duquenne - Stéphane Bullion - Karl Paquette - Stéphane Phavorin

Saison 2012-2013


mercredi 1 août 2012

Bye Bye 2011-2012


Saison 2011-2012

Serge Lifar - Alexeï Ratmansky
Phèdre/Psyché
21 septembre - 6 octobre 2011, Opéra Garnier
Programme - Première - Review
Phèdre et Thésée - Eros et Psyché  

La Source
Jean-Guillaume Bart
22 octobre - 12 novembre 2011, Opéra Garnier
Programme - Review 


Le ballet hors les murs : Biarritz, Gare du midi
Suite en Blanc/L'Arlésienne/Boléro
28-29 octobre 2011
Serge Lifar - Roland Petit - Maurice Béjart
Review


Cendrillon
Rudolph Nouréev
25 novembre 2011- 31 décembre 2012
Programme -  Première - Review - Rencontre


Onéguine
John Cranko
9-31 décembre 2011
Programme - Review


Orphée et Eurydice
Pina Bausch
4-16 février 2012
Programme - Première - Review - Rencontre


La Bayadère
Rudolph Nouréev
7 mars - 15 avril 2012
Programme - Review - Rencontre
Josua Hoffalt - Ludmila Pagliero

Jerome Robbins - Mats Ek
Dances at a gathering/Appartement
13-31 mars 2012
Programme - Review - Laure Muret


Roméo et Juliette
Sasha Waltz
7-20 mai 2012
Programme - Rencontre


L'Histoire de Manon
Kenneth MacMillan
21 avril - 13 mai 2012
Programme - Première - Review - Clairemarie Osta


La Fille mal gardée
Frederick Ashton
18 juin - 15 juillet 2012
Programme - Myriam Ould Braham


Le ballet hors les murs : US Summer Tour 2012, Chicago, Harris Theater
Giselle
Jean Coralli/Jules Perrot
26-28 juin 2012
Review - Albrecht

Le ballet hors les murs : US Summer Tour 2012, Chicago, Harris Theater
Suite en Blanc/L'Arlésienne/Boléro
Serge Lifar - Roland Petit - Maurice Béjart
30 juin - 1er juillet 2012
Review


Le ballet hors les murs : US Summer Tour 2012, New York David Koch Theater
Orphée et Eurydice
Pina Bausch
20-22 juillet 2012
Review - Orphée

Miscellaneous
Lettres d'un joueur - DVD Hommage à Robbins
Danseur - 24 hours in a man's life

dimanche 22 juillet 2012

Orphée et Eurydice, New York juillet 2012



L’opéra de Paris a conclu sa tournée américaine par un défi culturel. Paris risqué car bien que l’opéra dansé de Gluck et Bausch soit supporté par ses magnifiques interprètes, les représentations d'Orphée et Eurydice arrivaient en terres quasi vierges. Parce qu’ils avaient adoré Pina de Wim Wenders, les Américains se voyaient déjà en train de consommer Orphée et Eurydice comme le digest estampillé de surcroit Opéra de Paris qui leur ouvrirait la porte à la chorégraphe allemande, oubliant (ou ne sachant pas) que parfois, un certain coût d’entrée peut être nécessaire à l’appréciation d’une œuvre artistique. 
L’aspect résolument esthétique de la production et la magie du chant ont sans doute porté à l’acclamation du public les trois représentations plus que l’investissement symbiotique du spectateur dans l’œuvre à la philosophie pessimiste de Pina Bausch comme on le constate à Paris à chaque reprise de cette œuvre majeure. Par là-même la récompense émotionnelle qu’il en découle semble absente, comme si l’infinie tristesse du message n’avait pas de place dans la civilisation du positif à tout va. 


Pourtant, l’Orphée et Eurydice de Pina Bausch sur sa petite scène new yorkaise a gagné en grandeur ésotérique. La dimension infiniment profonde qu’apporte Stéphane Bullion à la souffrance dans le premier tableau est un accomplissement parfait du cheminement intérieur de la douleur à ses im-possibilités d’expression. Reprise, réitération dans des mouvements toujours aussi sur-déployés, Stéphane Bullion fait un travail sur l’épurement émotionnel qui est remarquable et qui se détourne de l’intention pour atteindre le spontané et l'évidence. Chaque mouvement improbable construit invisiblement son cheminement vers le paroxysme d’une souffrance inexprimable, l'émotion à son comble. Son corps entier exhale cette douleur inexorable alors que son visage perdu s’évertue à ne pas polluer cette douleur par des signes qui seraient trop ostensiblement convenus. 


Stéphane Bullion balance dans le premier acte entre  la violence lente imprimée à son corps dont il déploie tous les aspects avec une insistance perverse dans des magnifiques déploiements de bras parcourant son buste du bassin aux petits doigts en passant par cette cage thoracique surdimensionnée et les arrêts christiques ou inspirés, le regard vers le ciel à qui il semble remettre une quête ou attendre la décision suprême, à savoir avouer là son impuissance. 
Son malaise est aussi celui du spectateur préparé progressivement de manière initiatique à recevoir la suite d’une histoire qui visuellement déstabilise souvent, si l’on excepte le troisième tableau, le moment le plus simple et le plus lyrique de l’œuvre de Pina Bausch, concession à la tradition mais aussi peut-être encore, mise en relief par l’opposé des scènes qui l’entourent.



Orphée progresse ainsi dans sa quête intérieure avant de se confronter à l’extérieur, des antithèses de la gravité de son personnage : la version joyeuse, Amour que Muriel Zusperreguy porte en contre, comme une mise en valeur de la solennité de la douleur du personnage d’Orphée, et la version colérique d’Eurydice, que Marie-Agnès Gillot s’évertue à contraster comme un papillon rouge virevoltant hystériquement dans un dialogue impossible alors que le deuxième tableau le confronte à l’inconnu.
"die Hölle selbst tobt in mir,
ihr Feuer glüht durch meine Brust"
 
C’est peut-être dans sa manière de charmer les enfers qu’il faut comprendre la philosophie du personnage car au milieu des désordres violents, son corps se plie et se disloque avec plus d’énergie mais avec la même résolution contemplative, clé de sa séduction du Cerbère. 


L’intériorité de la douleur d’Orphée est un mode d’expression qui s’accorde parfaitement à l’austérité scénographique et le dialogue avec Maria Riccarda Wesseling, tout en contrôle également. La pâleur de Stéphane Bullion dans son costume minimaliste constamment mis en exergue par un halo de lumière blanche et la sombre Maria Riccarda Wesseling dans sa longue robe noire qui attire les ténèbres, se complètent et enrichissent ainsi l’histoire, non seulement par le texte que la cantatrice développe avec une clarté absolue mais aussi par un vécu identique du malheur intérieur, la voix grave aux soubresauts parfois rugueux faisant écho à l’exploitation des développements thoraciques surdimensionnés du danseur. La remarquable mezzo soprano vit ainsi travers le texte le reflet complet de la chorégraphie de Pina Bausch qui appuie sur les attitudes comme elle met en valeur les mots dans ses intonations. 


Elle prend son envol lors du solo final où le danseur à genoux dans le coin de la scène, le dos tourné au public lui offre la complète représentation de la douleur face aux corps échoués des Eurydice décédées. Il est incontestable que pour saisir le haut niveau de richesse de ces instants de communion entre les Orphée, la connaissance du texte est un atout que Pina Bausch n’avait pas négligé en choisissant la version allemande de l’opéra de Gluck. Il n’est pas impossible non plus d’en saisir la plupart des aspects compte tenu des interprétations hautement symboliques des deux artistes qui transcendent le langage simple d’apparence de leur art. 


Car c’est Orphée qui porte  l’idée que Pina Bausch semble avoir donné en remaniant l’opéra de Gluck de l’impossible espoir en l’homme et la fresque que dépeint la chorégraphe allemande a une toute autre signification que celle donnée à la légende par Gluck. Par la simplicité visuelle du décor, celle des mouvements, de leur écriture, des costumes et de l’arrangement scénique, elle fait une œuvre universelle sur la souffrance et le désespoir, pourvu qu’on en accepte l’existence. 



samedi 21 juillet 2012

dimanche 8 juillet 2012

lundi 2 juillet 2012

Epic French masterpieces, Chicago juin 2012

Stéphane Bullion avec Isabelle Ciaravola, Valentine Colasante et Dorothée Gilbert 


L’association Lifar-Petit-Béjart renommée ici  Epic French masters est un programme bien maîtrisé que le ballet de l’Opéra présente souvent en tournée depuis quelques années. Un programme assez typé dont seul le Boléro de Maurice Béjart a vraiment franchi les frontières, même si l’Arlésienne est donnée aussi par un certain nombre de compagnies en Europe, en particulier récemment.


Suite en Blanc
Serge Lifar /Edouard Lalo

Le style Lifar est peu représentatif de ce que la compagnie est actuellement mais les danseurs y démontrent leur savoir faire. Suite en Blanc a sans doute bien surpris même si l’exposition de ces figures d’école avait de quoi nourrir les discussions en elles-mêmes. Style et aussi interprétation, démarque la singularité du Ballet de l’opéra par rapport à ce qui se fait aux US, l’investissement de la personnalité des danseurs restant ici dans une stricte et faible marge de manœuvre, mais s'il était assez facile d’y reconnaître le tempérament de chacun. 

Stéphane Bullion - Isabelle Ciaravola

A Chicago, Suite en Blanc, s’est permis d’aligner pour la Première huit étoiles avant de laisser Premiers danseurs et Sujets s'insérer dans les soirées suivantes.  C’est comme ça, et pas autrement, des pas, une précision microscopique, une Ecole qui déroule son art, et seule l’aura particulière de chaque danseur permet de mêler et réécrire sans cesse une phrase identique qui porte une force en elle-même. Les variations s’enchaînent pour qu’on redécouvre chaque fois une nuance imperceptible qui dépasse, dans un regard, une main, parfois un port de tête… mais pas beaucoup plus, et pourtant, une subtilité infime qui change tout parfois. 
Même avec Dorothée Gilbert qui a dansé toutes les Flûtes  ce n’était à la fois jamais différent mais aussi jamais identique. Une variation enchanteresse alors que la salle est suspendue à chaque port de tête dans un silence quasi religieux accompagnant l’instrument. Une finesse suave, un rien mutine mais sans dépasser le bon goût, dans ce qu’on pourrait peut-être qualifier de variation la plus impudique de l'oeuvre. 

Stéphane Bullion - Dorothée Gilbert

Emilie Cozette et Marie-Agnès Gillot se partagent une Cigarette avec leur personnalité, une étalant sa langueur presque érotique, l’autre une séduction de princesse. Karl Paquette joue à fond le charme de la flexibilité de son corps dans la Mazurka là où Mathieu Ganio déploie des angles limpides. 
Stéphane Bullion et Isabelle Ciaravola grâce à des échanges de regards et une fougue bien sentie lors du porté poisson sauvent l’Adage d’un mielleux patent.
Mais Suite en Blanc n’est pas uniquement une affaire de solistes. Les garçons en particulier sont très affûtés et mis au premier plan, pas uniquement dans le pas de cinq. Ainsi Sébastien Bertaud, Cyril Mitilian, Fabien Révillion et Daniel Stokes si on peut citer les plus sollicités chaque soir ont remarquablement exemplifié la qualité de danse de la compagnie.
Le final grandiloquent qui met en scène les solistes garde un de ces charmes effervescents aux allures de Bacchanales où on resterait propre sur soi, en blanc quoi !


L'Arlésienne
Roland Petit / George Bizet

Stéphane Bullion

L’Arlésienne de Roland Petit est un peu plus marqué par la personnalité des danseurs, la qualité de leur danse et de leur interprétation. L’œuvre en elle-même a une consistance inégale et parfois déconcerte par sa chorégraphie, notamment pour le corps de ballet et parfois chez Vivette, laissant la part belle à l'interprète masculin sur qui repose à bien des égards, la clarté de la narration. Nul doute que le choc des cultures amorcé par Suite en Blanc se creuse avec ce second ballet même si le manège final où le danseur déploie technique et physicalité est un "crowd pleaser" qui fait mouche à chaque fois.


Stéphane Bullion

Le ballet narratif court et pas forcément simple de Roland Petit semble parfois laisser au bord de la route le fil de l’histoire, notamment avec Jérémie Bélingard qui mise trop sur l’énergie physique sans pouvoir exprimer l’évolution psychologique de Frédéri. L’incroyable morceau de bravoure final  s’en trouve même minoré par ce parti pris de l’imposition d’une folie déjà contracté dès les premières notes qu’il mène à la fin dans le mur, à grand coup d’accélérateur. La performance est impressionnante mais n’a pas beaucoup de sens. Jérémie Bélingard dont c’était pourtant la seule œuvre au programme de la tournée ne semble pas en avoir profité pour retravailler la narrativité un peu déficiente déjà dans ses dernières apparitions d’un ballet qu’il connaît bien, trop bien peut-être. Peut-être ne danse-t-il pas assez pour nourrir son art. Heureusement, par sa théâtralité exacerbée, Isabelle Ciaravola lui a donné une réplique justifiant un peu le personnage mal dégrossi qu'il dépeint, en soulignant l'impossibilité du dialogue.

Nolwenn Daniel - Benjamin Pech

A l’inverse, Benjamin Pech est un Frédéri complexe et touchant, mais souvent à la limite de ses possibilités physiques, parfois trop au-delà, ce qui est gênant lorsque l’ampleur, la puissance ne sert plus les moments les plus tendus de l’histoire. Il  construit  malgré tout bien son personnage progressivement pour lui donner une épaisseur qui soutient l’attention sans toutefois porter jusqu'au bout la tension dramatique d'un homme fêlé jusqu'à l'extrême, limité dans l'énergie physique que Roland Petit a donné à la psychologie de Frédéri. Nolwenn Daniel, délicate et naturaliste, est une Vivette touchante, victime d'un Frédéri déjà ailleurs.
Amandine Albisson dont c'était la prise de rôle aux côtés de Stéphane Bullion a très bien négocié une chorégraphie adaptée à des danseuses plus petites et elle devrait mettre à profit cette première sortie pour développer théâtralement sa Vivette.

Stéphane Bullion

Stéphane Bullion imprime une toute autre dimension au rôle qu’il maîtrise subtilement sur le plan dramatique et domine sur le plan physique. Il danse grand et large sur cette scène minuscule qu'il dévore avec passion, trace des lignes claires en nuançant son interprétation rendant l’histoire plus lisible. Les liaisons entre les tableaux sont fluides et ses allers retours entre le songe et la réalité ne sont pas uniquement remarqués par la présence de Vivette. Il y a là un vrai travail sur l’évasion mentale et la présence physique. Ses reprises de variations montrent une véritable progression de son état et son manège final n’est pas une variation de plus qui démontre ses possibilités physiques mais une exaltation psychologique à travers une rare puissance, le condensé de sa transformation mentale qui le mène à se torturer psychologiquement puis se violenter physiquement et enfin tout naturellement à se suicider.


Le Boléro
Maurice Béjart / Maurice Ravel

Nicolas Le Riche

Difficile de parler du Boléro et de quelqu’un d’autre que Nicolas Le Riche. On n’est jamais indépassable mais ce que réalise la figure de proue du ballet de l’Opéra de Paris tient de l’exceptionnel et remise ses collègues à l’anecdotique. Passer après Nicolas Le Riche qui ouvrait le bal est  un challenge que personne ne peut encore relever, même Marie-Agnès Gillot, très en forme aux Etats-Unis, qui a pourtant semblé plus incisive que lors de ses dernières sorties dans cette œuvre. 
Nicolas le Riche passe au-delà de la musique qu’on a souvent pensé comme l’élément galvanisant d’une manipulation de masse. Ici, c’est un homme qui incorpore le rythme, le domestique et devient rythme lui-même, s’insinue dans la tête et dans le corps du spectateur qui bat de plus en plus fort à chaque mouvement vers lui.

Nicolas Le Riche
Les pauses les mains jointes temporisent les élans comme autant de réserve de puissance mais aussi de charisme, une retenue qui va permettre de décupler le plaisir de la jouissance finale dans une tension physique au bord de l’anomie.
Mais sur son tapis rouge,  Nicolas Le Riche n’est pas seul avec son corps et ses regards. Il dialogue là aussi avec un corps de ballet outrageusement sexuel qu’il conduit dans des méandres avec une montée en puissance maîtrisée savamment. Avec cette force des gens dangereux, Nicolas Le Riche intouchable dans son rond rouge pénètre les gens par l’esprit et par le corps, et laisse une salle en état d'excitation absolue.

Nicolas Le Riche