Ballet en deux actes d'après Jean Dauberval
Musique - Louis Joseph Ferdinand Herold
Arrangements musicaux John Lanchbery
Chorégraphie - Frederick Ashton (1960) remontée par Alexander Grant
Décors et costumes - Osbert Lancaster
Lumières - George Thomson
Production entrée au répertoire du Ballet de l''Opéra le 22 juin 2007
Orchestre de l'Opéra national de Paris
Direction musicale - Barry Wordsworth
Il est normal que le Ballet de l'opéra de Paris envoie en Australie ses meilleurs éléments pour le représenter mais pourquoi programmer au même moment un ballet à Paris ? Il est cependant peu probable, même si Nicolas Le Riche avait fait l'entrée au répertoire en 2007, que les stars de la compagnie, se soient bousculées sur cette Fille mal gardée. Ce ballet plutôt tarte de Frederick Ashton dont on se demande s'il n'a justement pas été acquis pour combler les manques de personnel lorsqu'il y a tournée (c'était déjà le cas il y a deux ans) pourrait sans doute se satisfaire mieux de jeunes danseurs qui lui donneraient une ambiance de fête de fin d'école, mais les danseurs de l'Opéra de Paris ont peut-être pris trop au sérieux cette farce.
Le ballet semble en effet souvent hésiter sans jamais vraiment choisir entre l'investissement dans une réalisation ardue d'une comédie burlesque et l'abandon à une danse léchée. On constate surtout un manque flagrant de direction d'acteurs, ce qu'on ne reproche pas aux danseurs souvent novices, avec sur scène beaucoup de surnuméraires et d'élèves de l'Ecole de danse. Bien pour eux au passage, mais cela ne trompe pas grand monde et les rangs à vide au parterre -assez inhabituel à Garnier- montrent que le public n'est pas si captif que certains veulent le croire ou le dire.
Le parti pris de présenter quelques premiers danseurs peu en vue mais reconnus pour leurs qualités techniques ou des jeunes étoiles inexpérimentées n'excuse pas totalement le manque d'attrait de ces représentations, comme si ce mélange hétérogène des exclus d'Australie pouvait sur ce seul fait galvaniser une ambiance de groupe. Le plus intéressant justement est la distribution la plus audacieuse, et bien moins "titrée" avec Adrien Couvez, Josua Hoffalt, Aurélien Houette et Muriel Zusperreguy qui en prenant l'histoire avec dérision rend au spectacle sa nature anecdotique. Les autres danseurs, à l'exception de Dorothée Gilbert qui en fait des tonnes, donnent un sérieux à leur interprétation qui n'encourage pas au sourire. En effet, la danse est souvent très appliquée, au mieux plutôt fluide, donc contre productive par rapport à l'idée du ballet... et même Mathias Heymann dont par ailleurs la danse est plutôt jouissive fait preuve d'une faiblesse interprétative qui anéantit... ce qui donne un spectacle ras des pâquerettes et souligne l'indigence et le ridicule de l'histoire. Il faut avoir une sacrée dose de patience et d'humour pour apprécier le "ballet de boulevard"...
Bref, si l'on revient au challenge de reprendre ce ballet à l'humour si "britannique", il semble que l’intérêt de cette distribution est le détachement visible par rapport au thème et le souci de traiter au mieux un tel sujet, un travail de méthode en somme. On a véritablement l’impression de voir des acteurs, ce qui d’habitude est gênant, alors qu'ici, étant donné le grotesque de l’histoire, l'idée est plutôt bienvenue. Dans ce domaine, Josua Hoffalt et Muriel Zusperreguy jouent dans le même registre que la veuve Simone d'Aurélien Houette et l'Alain d'Adrien Couvez, remarquable dans sa composition. Il n’y a pas de dichotomie entre un monde réel et potentiellement probable, celui des amoureux Colas et Lise et un monde du grotesque, du théâtre, celui d’Alain et Simone. Ils mettent la distance entre l’histoire et la réalité : on est au théâtre.
Ce parti pris est partagé par Dorothée Gilbert mais n’est pas renvoyé par son partenaire Mathias Heymann qui joue trop littéralement alors que Nicolas Le Riche, il y a deux ans, se régalait de cette stupidité. Grâce à sa danse euphorique, Mathias Heymann arrive un peu à atténuer ses manques de qualité dramatique mais il ne peut atteindre l’adéquation qu’offre Josua Hoffalt avec la bonhomie de la farce.
Ce parti pris est partagé par Dorothée Gilbert mais n’est pas renvoyé par son partenaire Mathias Heymann qui joue trop littéralement alors que Nicolas Le Riche, il y a deux ans, se régalait de cette stupidité. Grâce à sa danse euphorique, Mathias Heymann arrive un peu à atténuer ses manques de qualité dramatique mais il ne peut atteindre l’adéquation qu’offre Josua Hoffalt avec la bonhomie de la farce.
Dorothée Gilbert & Mathias Heymann
On peut trouver une certaine jouissance dans la prestation de Mathias Heymann car il est en phase d’un point de vue de la danse avec Dorothée Gilbert et leur scintillement technique se reflète comme dans des miroirs et explose à la vue de tous. Mais lorsqu’il danse avec Myriam Ould-Braham, c’est l’ennui le plus profond car il ne reste plus alors que ce sourire qui au finish le rend un peu, sinon niais, simplet. Il n'est plus alors le joli cœur de l’histoire d'amour de Colas et Lise, mais le dindon de la pièce de théâtre.
C’est encore pire avec le couple Mathilde Froustey-Emmanuel Thibault, qui parce que l’une trop autoritaire, l’autre trop crispé, font du ballet une comédie très sérieuse, comme si c’était l’histoire de la mère Simone, sans aucune mise à distance… c’est-à-dire d’une pensée archaïque tellement terre à terre. que peu probable. En raidissant le propos, ils accentuent un regard plutôt malsain sur Alain, en idiot du village, stigmatisé en tant que tel et renvoient l’image de la marâtre masculine, dansée par un homme, processus plutôt facile pour obtenir le rire. L’aspect comique du ballet n’existe alors plus dans le rendu de l’histoire mais juste dans l'esprit du spectateur intello…
Dans ces deux distributions, les danseurs ne sont pas en adéquation, chacun joue son rôle et le danse comme si la cohésion de l’histoire n’était pas primordiale. Cela permet une nouvelle fois de s’interroger sur ce qu’est le ballet narratif et le rapport entre les qualités de danseurs et d’acteurs, car la danse dans un théâtre ne doit pas être une démonstration de technique mais un propos artistique au service de l'histoire quel que soit le thème abordé. C’est pour cette raison qu’en assumant correctement cette acquisition, l’opéra de Paris pourrait accorder une chance à ce ballet avec des acteurs plus mûrs, même si d’apparence à contre-emploi ou se donner les moyens de faire travailler correctement les danseurs choisis.
C’est encore pire avec le couple Mathilde Froustey-Emmanuel Thibault, qui parce que l’une trop autoritaire, l’autre trop crispé, font du ballet une comédie très sérieuse, comme si c’était l’histoire de la mère Simone, sans aucune mise à distance… c’est-à-dire d’une pensée archaïque tellement terre à terre. que peu probable. En raidissant le propos, ils accentuent un regard plutôt malsain sur Alain, en idiot du village, stigmatisé en tant que tel et renvoient l’image de la marâtre masculine, dansée par un homme, processus plutôt facile pour obtenir le rire. L’aspect comique du ballet n’existe alors plus dans le rendu de l’histoire mais juste dans l'esprit du spectateur intello…
Dans ces deux distributions, les danseurs ne sont pas en adéquation, chacun joue son rôle et le danse comme si la cohésion de l’histoire n’était pas primordiale. Cela permet une nouvelle fois de s’interroger sur ce qu’est le ballet narratif et le rapport entre les qualités de danseurs et d’acteurs, car la danse dans un théâtre ne doit pas être une démonstration de technique mais un propos artistique au service de l'histoire quel que soit le thème abordé. C’est pour cette raison qu’en assumant correctement cette acquisition, l’opéra de Paris pourrait accorder une chance à ce ballet avec des acteurs plus mûrs, même si d’apparence à contre-emploi ou se donner les moyens de faire travailler correctement les danseurs choisis.